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.Alors tout devint clair et lucide pourmoi ; je me reprochai ce qui venait d arriver, comme si j eusse étéle vrai coupable.Il me sembla entendre des gémissements : lemalheureux bijoutier pouvait n être pas mort ; peut-être était-il enmon pouvoir, en lui portant secours, de réparer une partie du malnon pas que j avais fait, mais que j avais laissé faire.J appuyaimes épaules contre une de ces planches mal jointes qui séparaientl espèce de tambour dans lequel j étais couché de la salleinférieure ; les planches cédèrent, et je me trouvai dans la maison.« Je courus à la chandelle, et je m élançai dans l escalier ; uncorps le barrait en travers, c était le cadavre de la Carconte.« Le coup de pistolet que j avais entendu avait été tiré surelle : elle avait la gorge traversée de part en part, et outre sadouble blessure qui coulait à flots, elle vomissait le sang par labouche.Elle était tout à fait morte.J enjambai par-dessus soncorps, et je passai. 336 « La chambre offrait l aspect du plus affreux désordre.Deuxou trois meubles étaient renversés ; les draps, auxquels lemalheureux bijoutier s était cramponné, traînaient par lachambre : lui-même était couché à terre, la tête appuyée contre lemur, nageant dans une mare de sang qui s échappait de troislarges blessures reçues dans la poitrine.« Dans la quatrième était resté un long couteau de cuisine,dont on ne voyait que le manche.« Je marchai sur le second pistolet qui n était point parti, lapoudre étant probablement mouillée.« Je m approchai du bijoutier ; il n était pas morteffectivement : au bruit que je fis, à l ébranlement du planchersurtout, il rouvrit des yeux hagards, parvint à les fixer un instantsur moi, remua les lèvres comme s il voulait parler, et expira.« Cet affreux spectacle m avait rendu presque insensé ; dumoment où je ne pouvais plus porter de secours à personne jen éprouvais plus qu un besoin, celui de fuir.Je me précipitai dansl escalier, en enfonçant mes mains dans mes cheveux et enpoussant un rugissement de terreur.« Dans la salle inférieure, il y avait cinq ou six douaniers etdeux ou trois gendarmes, toute une troupe armée.« On s empara de moi ; je n essayai même pas de fairerésistance, je n étais plus le maître de mes sens.J essayai deparler, je poussai quelques cris inarticulés, voilà tout.« Je vis que les douaniers et les gendarmes me montraient dudoigt ; j abaissai les yeux sur moi-même, j étais tout couvert de 337 sang.Cette pluie tiède que j avais sentie tomber sur moi à traversles planches de l escalier, c était le sang de la Carconte.« Je montrai du doigt l endroit où j étais caché.« Que veut-il dire ? demanda un gendarme.« Un douanier alla voir.« Il veut dire qu il est passé par là, répondit-il.« Et il montra le trou par lequel j avais passé effectivement.« Alors, je compris qu on me prenait pour l assassin.Jeretrouvai la voix, je retrouvai la force ; je me dégageai des mainsdes deux hommes qui me tenaient, en m écriant :« Ce n est pas moi ! ce n est pas moi !« Deux gendarmes me mirent en joue avec leurs carabines.« Si tu fais un mouvement, dirent-ils, tu es mort.« Mais, m écriai-je, puisque je vous répète que ce n est pasmoi !« Tu conteras ta petite histoire aux juges de Nîmes,répondirent-ils.En attendant, suis-nous ; et si nous avons unconseil à te donner, c est de ne pas faire résistance.« Ce n était point mon intention, j étais brisé parl étonnement et par la terreur.On me mit les menottes, onm attacha à la queue d un cheval, et l on me conduisit à Nîmes. 338 « J avais été suivi par un douanier ; il m avait perdu de vueaux environs de la maison, il s était douté que j y passerais lanuit ; il avait été prévenir ses compagnons, et ils étaient arrivésjuste pour entendre le coup de pistolet et pour me prendre aumilieu de telles preuves de culpabilité, que je compris tout desuite la peine que j aurais à faire reconnaître mon innocence.« Aussi, ne m attachai-je qu à une chose : ma premièredemande au juge d instruction fut pour le prier de faire chercherpartout un certain abbé Busoni, qui s était arrêté dans la journée àl auberge du Pont-du-Gard.Si Caderousse avait inventé unehistoire, si cet abbé n existait pas, il était évident que j étais perdu,à moins que Caderousse ne fût pris à son tour et n avouât tout.« Deux mois s écoulèrent pendant lesquels, je dois le dire à lalouange de mon juge, toutes les recherches furent faites pourretrouver celui que je lui demandais.J avais déjà perdu toutespoir.Caderousse n avait point été pris.J allais être jugé à lapremière session, lorsque le 8 septembre, c est-à-dire trois mois etcinq jours après l événement, l abbé Busoni, sur lequel jen espérais plus, se présenta à la geôle, disant qu il avait apprisqu un prisonnier désirait lui parler.Il avait su, disait-il, la chose àMarseille, et il s empressait de se rendre à mon désir.« Vous comprenez avec quelle ardeur je le reçus ; je luiracontai tout ce dont j avais été témoin, j abordai avec inquiétudel histoire du diamant ; contre mon attente elle était vraie de pointen point ; contre mon attente encore, il ajouta une foi entière àtout ce que je lui dis.Ce fut alors qu entraîné par sa douce charité,reconnaissant en lui une profonde connaissance des mSurs demon pays, pensant que le pardon du seul crime que j eussecommis pouvait peut-être descendre de ses lèvres si charitables, jelui racontai, sous le sceau de la confession, l aventure d Auteuildans tous ses détails.Ce que j avais fait par entraînement obtint le 339 même résultat que si je l eusse fait par calcul, l aveu de ce premierassassinat, que rien ne me forçait de lui révéler, lui prouva que jen avais pas commis le second, et il me quitta en m ordonnantd espérer, et en promettant de faire tout ce qui serait en sonpouvoir pour convaincre mes juges de mon innocence.« J eus la preuve qu en effet il s était occupé de moi quand jevis ma prison s adoucir graduellement, et quand j appris qu onattendrait pour me juger les assises qui devaient suivre celles pourlesquelles on se rassemblait
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